COMPTE RENDU
DE L’ATELIER DE RESTITUTION DES
RESULTATS
DE L’ETUDE SUR LE PROFIL PAYS
EN MATIERE DE GROSSESSES NON DESIREES
04 JUIN 2015
Un atelier de restitution des résultats sur le profil pays
par rapport aux grossesses non désirées s’est tenu le 04 juin 2015 au
Terrou-Bi, en présence d’une délégation de députés dirigée par la présidente de
la commission santé de l'assemblée nationale.
La cérémonie d’ouverture a été
présidée par le Directeur Général de la Santé, qui a successivement donné la
parole aux représentants de Pop Council, PPD-ARO (Projet Partenaire en
Population et Développement/ région Afrique) et aux présidentes de l’ASBEF et
de la commission santé de l’assemblée nationale. Puis dans son allocution de
bienvenue, il a rappelé que les grossesses non désirées étaient responsables de
naissances non planifiées, de fausses couches, d’avortements provoqués et
d’infanticides.
Le déroulement de l’atelier a
consisté en une présentation des résultats de la recherche et en la tenue d’un
panel sur le thème des grossesses non désirées, respectivement suivis de
discussions.
I.
Restitution des résultats de la recherche
L’Institut de Population,
Développement, Santé de la Reproduction a ensuite présenté les principaux
résultats de la recherche ayant consisté en une revue documentaire et en des
interviews de personnes ressources.
Les textes disponibles en matière de santé de la reproduction (SR) au Sénégal sont essentiellement :
-
La déclaration de politique
de population adoptée en 1988, réactualisée en 2002 (devant faire l’objet d’une
deuxième réactualisation avec le recensement de la population de 2014) ;
-
La loi 2005-18 sur la SR ;
-
La loi 04/2010 sur le
VIH/SIDA ;
-
L’article 305 du code pénal
très restrictif pour l’avortement.
Les initiatives et textes régionaux en faveur d’une meilleure prise en compte des droits sexuels et reproductifs des femmes sont essentiellement :
-
La caravane pour accélérer
la réduction de la mortalité maternelle en Afrique (CARMMA) et ;
-
Le protocole de Maputo.
Les indicateurs de la SR bien qu’ayant connu des améliorations au fil du temps restent encore préoccupants :
-
L’indice synthétique de
fécondité de 6,6 enfants par femme en 1986 est passé à 5,0 en 2014. Les
pays africains ayant une population essentiellement jeunes ont une opportunité
historique à saisir avec la capture du dividende démographique (réalisable si
la fécondité est maitrisée, les investissements surtout dans les secteurs de
l’éducation et de la santé sont effectifs et s’il y a une bonne politique de
l’emploi des jeunes) ;
-
18,7% des adolescentes âgées de 15 à 19 ans
ont eu leur première grossesse (25% en milieu rural contre 12% en milieu
urbain) ;
- Le taux de prévalence
contraceptive (TPC) chez les femmes âgées de 15 à 49 ans est passé de 12% en
2010-2011 à 20,3% en 2014 contre 5 à 12% chez les adolescentes mariées âgées de
15 à 19 ans ;
-
Il demeure néanmoins que
31,2% des femmes en union ont des besoins non satisfaits en planification
familiale (PF) ; l’enquête ISSU de 2012 a noté
des insuffisances en matière d’intégration des services de PF, avec 75% des
femmes fréquentant les structures de santé qui à la sortie, n’avaient
reçu aucune information, ni conseils sur la PF ;
- Malgré une nette
amélioration de l’accessibilité géographique des soins après avortement (95%
des centres de santé équipés en 2006 contre 29% en 2003), l’accessibilité
financière pose problème en milieu rural (en 2006 les coûts étaient évalués à
38,12 USD au niveau des postes de santé - 15,07 USD dans les centres de santé
et 18,02 USD dans les hôpitaux).
Les perspectives pour réduire les
grossesses non désirées au Sénégal seraient :
- D’effectuer des enquêtes
approfondies auprès des cibles (collecte, analyse et interprétation des
données),
- De réviser le dispositif
législatif et réglementaire en matière de SR et d’avortement en
particulier ;
- De restructurer le système
de santé ;
- De former et de recycler
les prestataires en SR ;
- De renforcer l’offre en
matière de SR et de soins après avortement avec une attention particulière à
l’accessibilité économique.
Les discussions qui ont suivi
cette première présentation ont porté sur :
- Les différents tabous
entourant les cas de viols et d’incestes (familial, institutionnel avec les
tentatives de médiation au niveau des chefs de quartiers- postes de police-
gendarmeries et communautaire) ;
- Les nombreux cas de viols
suivis de grossesses reçus par la maison rose de Guédiawaye (17 cas survenus chez des mineures âgées
entre 10 ans et demi et 14 ans, de
janvier 2015 à début juin 2015) ;
- La « non gratuité »
de la prise en charge médicale et psychologique des victimes de viols et
d’incestes ;
-
Le manque de structures
d’accueil pour les filles porteuses de grossesses forcées ;
- Le mariage précoce des
adolescentes dont le taux est de 24% au niveau national, avec des variations
selon les régions (56% à Matam et 67% à Kolda) et le niveau d’études ;
-
La légalisation du mariage
des adolescentes à partir de 16 ans et le fait que seuls les rapports sexuels
avec des filles âgées de moins de 13 ans sont punis selon nos textes
juridiques ;
-
Les conditions draconiennes
posées par ces textes pour autoriser une femme à réaliser une IVG ;
-
L’opposition des maris ou
partenaires mâles à l’accès aux services de planification familiale de leur
conjointe ou partenaire ;
-
La responsabilité occultée
et minimisée des hommes dans les grossesses non désirées.
II.
Pannel sur les grossesses non désirées
Le panel présidé par le Pr
Ousmane Ndiaye- pédiatre spécialisé en néonatalogie, était animé par le Dr
Marie Louise Corréa- présidente de l’ASBEF, Mme Haoua Dia Thiam- présidente de
la commission santé de l’assemblée nationale et le Professeur Cheich Tidiane
Cissé- gynécologue.
Les sous
thèmes abordés par les panélistes étaient :
-
Accès des adolescentes aux
services de santé de la reproduction ;
-
Problématique de
l’éducation à la santé sexuelle des adolescent(e)s ;
-
Services de santé adaptés
aux adolescentes.
S’agissant de l’accès des
adolescentes aux services de SR, il a été jugé globalement insuffisant,
qualitativement et quantitativement, tant en terme de suivi de la grossesse, de
prise en charge de l’accouchement, de conseils SR, que de prévalence contraceptive.
Il est constaté un déficit de l’offre de soins de SR surtout en zone rurale,
une inadéquation de l’offre par rapport à la demande, de même que la cherté des
coûts des prestations.
D’autres points ont été abordés dans ce sous thème, notamment :
D’autres points ont été abordés dans ce sous thème, notamment :
-
Le fort taux de besoins non
satisfaits en PF des adolescentes de plus de 33% ;
-
leur exposition aux
IST/SIDA, MGF et à la consommation de drogue et tabac ;
-
les causes des grossesses
précoces liées aux mariages précoces mais aussi aux cas de viol, à la curiosité
des jeunes et à l’insuffisance d’éducation sexuelle ;
- les conséquences les plus
fâcheuses en résultant sont les avortements à risque et les infanticides.
Quant à l’éducation sexuelle des
adolescent(e)s, les communications ont souligné leur intégration dans les
programmes EVF avec l’ONG GEEP et FAWE pour le cours moyen secondaire, le rôle
important joué par les pairs éducateurs de l’ASBEF. La problématique
grandissante de la sexualité des jeunes avec le développement des TIC a été
évoquée.
L’insuffisance des centres
conseils Ado (16) a amené le ministère de la santé à créer au sein des
structures sanitaires près de 2000 espaces Ado.
Les recommandations issues de cette journée d’échanges étaient les
suivantes :
- Se rapprocher de la Task
force pour capitaliser les recommandations issues de l’atelier national de
partage des résultats de l’enquête Guttmacher sur l’avortement provoqué au
Sénégal tenu en avril 2015 ;
- Se réunir autour de la
stratégie nationale de protection de l’enfant et la compléter par la contribution
du secteur de la santé ;
- Avoir une stratégie
harmonisée de lutte contre les grossesses précoces, élaborée avec l’ensemble
des acteurs et institutions, à opérationnaliser ensemble avec mobilisation
et mise en commun des ressources (en faire un exemple type de collaboration
multisectorielle);
- Amener les communautés à
comprendre la problématique et à participer à sa résolution ;
- Avoir un large consensus,
réviser notre vocabulaire et parler un même langage (définition commune de la
pédophilie) ;
- Mettre en place un
dispositif d’accompagnement des adolescents et avoir une réponse éducative,
formative et non répressive ;
- Réviser les curricula et y intégrer
la planification familiale ;
- Développer une politique de
santé sexuelle ;
- Avoir un projet éducatif
global ;
- Capaciter les parents à
travers les écoles des parents ;
- Adapter l’éducation
sexuelle des enfants à nos valeurs culturelles et l’élargir aux enfants
non scolarisés ;
-
Donner les mêmes chances
aux filles et aux garçons dès leur plus jeune âge ;
-
Eradiquer le fléau des
« enfants dans la rue » ;
-
Donner aux enfants des
capacités de discernement, de négociation
-
Maintenir les filles à
l’école jusqu’après le secondaire ;
-
Retarder la survenue de la
première grossesse chez les adolescentes mariées précocement (16 ans) en
attendant les révisions des textes juridiques ;
-
Assurer une prise en charge
gratuite des victimes de viol et d’inceste suivies de grossesses ;
-
Habiliter les structures de
santé pour une meilleure prise en charge de ces cas ;
-
Criminaliser les viols d’enfants ;
élargir la possibilité de l’avortement médicalisé aux cas de viol, d’inceste
suivis de grossesses ;
-
Réviser les textes
juridiques sénégalais et appliquer les conventions internationales
ratifiées ;
-
Diffuser davantage la loi
SR ;
-
Evaluer les Centres
conseils Ado ;
-
Mettre l’accent sur l’accès
des jeunes à l’information et à des services de santé adaptés à leurs
besoins ;
- Réduire
les coûts des méthodes contraceptives et améliorer l’accessibilité financière
aux services de SR ; Mettre l’accent sur l’autonomisation des femmes.
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